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Judah Warsky & Flavien Berger : seuls two (Interview + concours)

Quand on enchaîne les concerts (beaucoup de concerts), il peut arriver qu’une certaine routine s’installe. Pas une lassitude, non, car on a en permanence conscience de ce privilège qu’est le nôtre de voir régulièrement sur scène des artistes qu’on admire, mais plutôt une sorte de train-train « pinte-clope-RP(otes) » qui fait que l’on passe parfois à côté de l’essentiel.
Et puis il y a LE concert qu’on attend impatiemment, celui où le matin-même on trépigne en réécoutant pour la 20e fois dans sa salle de bain la dernière galette de ceux, celui ou celle qui sera on stage dans quelques heures. Celui où une fois sur place, on comprend qu’il sera mémorable et on ressent une agréable chaleur.

Mercredi 28 octobre dernier, dans un Badaboum prêt à exploser, dont même le fumoir débordait de tous côtés, la soirée French Clubbing organisée par Polybrid fut de ceux-là. Un programme frenchy donc, mais éclectique, avec une Juliette Armanet gracile, tout en classe et en spontanéité pour ouvrir les festivités, devant un public certes encore clairsemé. Ça a aussi du bon parfois, l’intimité.
Se sont ensuite succédés des membres de l’Electro-Royauté, François Ier et l’incroyable Guido Cesarsky d’Acid Arab pour terminer de surexciter une salle blindée, avant les déflagrations Judah Warsky et Flavien Berger.

Pour Judah Warsky aka Mathieu Cesarsky, il s’agissait de la release party de son magnifique dernier EP « Seul » réalisé avec Flavien, à savoir « Cinq chansons et autant de différentes façons d’aborder le thème, de la solitude subie par le héros de Seul à celle désirée et propice à l’introspection du narrateur de Au-Dessus de Tout, la solitude qu’on s’auto-inflige Face à l’Ecran, et celle qu’on cherche à fuir En Soirée », comme il l’a lui-même expliqué.
L’alchimie entre les deux acolytes est palpable, comme nous avons pu le constater en papotant avec eux quelques minutes avant l’entrée en scène de Mathieu. Interview croisée.

GBHM : Flavien, comment décrirais-tu Mathieu rapidement en quelques mots si tu voulais me le présenter?

FB : Mathieu ou Judah Warsky ?

GBHM : Mathieu Cesarsky en tant que Judah Warsky.

FB : Je me suis fait la réflexion que le « W » de Warsky était peut-être le Wario [révise tes classiques Nintendo, NDLR] de Cesarsky [rires].

GBHM : Carrément un double maléfique.

FB : Tu vois, comme l’être antipode du mec. En réalité, c’est quelqu’un que je connais depuis que je sors de la musique sur Pan European, qui a été là à des étapes charnières sans qu’on s’en rende compte. C’est un aîné du label, mais aussi et surtout un pote.

GBHM : Mathieu, toi tu parles de Flavien comme de ton poteau, ton frérot, ton…

JW : Mon protégé, tout à fait. Flavien Berger, certains l’appellent Flavien BG. Mais moi je l’appelle Flavien Warsky parce que c’est mon reuf [ils se font une accolade].

GBHM : C’est également ton camarade de label comme il l’a rappelé, autant de raisons qui font que tu lui as proposé de travailler avec toi sur l’EP « Seul ».

FB : C’est cool que tu dises EP. Y a plein de gens qui ont dit « album » pour en parler.

JW : Au départ, je ne voulais pas l’appeler « EP », donc je disais « le disque ».

FB : Du coup je trouve ça bien que tu dises EP, car c’est exactement ça.

JW : Un EP, un mini-album, un maxi, les formats n’existent plus vraiment aujourd’hui. Donc on fait ce qu’on veut.

GBHM : Mathieu, tu vous qualifies tous les deux de « monstre bicéphale à quatre mains » à propos de votre travail sur Seul, le terme « monstre » m’ayant immédiatement fait penser à « Léviathan » [premier album de Flavien Berger sorti cette année sur Pan European donc]. C’était pas trop compliqué en termes de coordination, d’autant plus que l’EP est particulièrement éclectique ?

FB : Non, au contraire. En fait, tout a été hyper naturel. Et libre. On a eu des cessions où on travaillait éloignés et d’autres où on travaillait ensemble et les deux étaient super fluides.

JW : Il y en a eu une, particulièrement ouf, qui était celle de « Seul », le titre éponyme. Ou celle des voix, qui a été particulièrement intense car elle a duré de 10h du matin à 4h le lendemain.

FB : « Seul », ouais je m’en souviens.

JW : On n’a rien compris, à la fin on avait un titre fini, on ne savait plus trop comment. Je te jure, quand je réécoute, je ne sais plus qui a fait quoi.

FB : Ça a existé aussi grâce à nos studios communs, ceux de Pan European au Point FMR. On avait un parc d’instruments à notre disposition, on pluggait, on jouait, on imaginait et c’était parti en deux secondes.

JW : Et on laissait les portes ouvertes pour que…

FB : Les gens passent et nous ramènent des bières.

JW : Ou juste passent dire bonjour.

FB : Du coup c’est comme ça que O est venu faire de la flûte.

JW : Il y a aussi Louise et Laurie qui sont passées, les deux meufs qui ont et vont réaliser les clips tirés de l’EP. Elles étaient là comme en public, dans le studio, c’était vraiment cool.

GBHM : A propose de clip, j’ai vu hier le clip de « Seul » réalisé par Sébastien Auger, qui est génialement flippant, en partie grâce à Thomas de Pourquery [du groupe VKNG] qui joue dedans. C’était quoi le brief  ?

FB : Moi je l’ai vu pour la première fois ce matin.

JW : C’est Séb le réalisateur qui a eu l’idée, qui l’a scénarisé. Moi j’ai juste donné mon avis sur 2-3 choses parce qu’en général, quand je bosse avec quelqu’un, je lui fais confiance. La plupart de mes clips, c’est des potes qui les ont faits, mais pas lui, je ne le connaissais pas. C’est lui qui nous a approché en disant : « Il paraît que Judah Warsky prépare un nouveau disque, ça m’intéresserait de faire un clip, vous pouvez me l’envoyer ? ». Et voilà.

GBHM : C’est marrant parce que c’est lui qui a réalisé le clip d’Etienne Jaumet « La Visite » et que Flavien a participé à la collection « Séquences » avec Etienne.

FB : [se foutant gentiment de ma gueule] Et là on arrive à la conclusion que le monde est petit. T’as vu le concert à Radio France après la projection ?

GBHM : Oui, j’y étais, c’était assez étrange.

FB : C’était bien chelou, un peu cold, j’avais des barrières devant moi.

JW : Etienne est un pote aussi, il me soutient depuis le début.

FB : Le premier concert de Judah Warsky que j’ai vu, il y avait d’ailleurs Etienne Jaumet en silhouette devant moi à la Maroquinerie. [S’adressant à Mathieu] Tu sais, le concert où tu étais habillé en blanc et où tu as sorti « ceci est un corps-sampler, je sample ma voix, je sample ma voix, je sample ma voix… » en montant dans les aigus. C’était mortel ce concert.

JW : Et dire que je ne m’en souviens pas du tout…

GBHM : Vous m’avez parlé du studio « portes ouvertes » pendant les cessions d’enregistrement. Y-a-t-il une autre anecdote qui vous aurait particulièrement marquée ?

JW : Il y a eu ce jour où on rentrait chez tes parents.

FB : Ah mais ouais ! J’avais zappé cette phase, mais c’était super beau. J’ai vécu chez eux très longtemps et ma sœur m’a donné son piano, qui est donc chez eux. C’est mon instrument de composition et on est allé enregistrer les parties de piano qu’on voulait rajouter au disque chez mes parents un soir. On a fait la chose en deux étapes. On est d’abord allé à la Rhumerie à Mabillon pour boire des « Père Serge » tous les deux parce que je cite ce cocktail dans mon album et que Mat voulait absolument en boire avec moi.

JW : En fait c’était en trois étapes parce que d’abord je suis allé te chercher au taf, je t’ai regardé taffer.

FB : Oui, tu as enfin vu où je bossais. On est donc ensuite allé boire des Père Serge et après on est parti chez mes parents pour enregistrer les pianos jusqu’au dernier métro. Et tu t’es rendu compte d’un truc de ouf.

JW :  On faisait « Au-dessus de tout » où il y a de gros accords de piano, bien longs, c’est Fla qui jouait, il avait le casque et moi j’entendais uniquement le piano, je n’avais pas de casque, j’étais assis près du micro et j’entendais des harmoniques incroyables, son piano fait des harmoniques très particulières, et je me suis dit qu’on aurait dit une voix humaine, qu’on dirait la voix de Flavien quand il chante en falsetto dans les aigus. Après j’ai pensé que j’étais foncedé, je l’étais sûrement d’ailleurs. Je lui ai demandé depuis quand il avait ce piano. Il m’a répondu qu’il l’avait depuis toujours. Donc quand il a commencé à chanter, c’était sur ce piano. Tout s’expliquait.

FB : Moi je n’avais jamais autant travaillé avec un musicien avant, de manière aussi aboutie.

JW : Et après on a hyper bien bouffé parce que ta mère cuisine trop bien.

FB : Mais ouais, c’est vrai ! On a bouffé aussi, c’était tellement bien.

GBHM : Vous étiez donc en osmose tous les deux. Mais selon vous, toute production importante n’est-elle pas quelque part l’enfant de la solitude comme l’a écrit Goethe dans ses Mémoires ?

JW : C’est drôle que tu en parles parce qu’en venant ici, dans le métro j’ai vu un truc similaire, je l’ai pris en photo [il sort son portable pour me montrer]. Tu sais, il y a des citations dans le métro et il y en avait une de Picasso qui disait un peu la même chose que Goethe : « Rien ne peut être fait sans la solitude, je me suis créé une solitude que personne ne soupçonne ». C’est sûr que quand tu es avec tes copains, en train de boire des coups, ça ne va pas forcément te donner envie d’aller t’enfermer pour faire de la zic. C’est bien aussi de savoir s’ennuyer, parfois. Quand tu t’ennuies, c’est là que tu commences à avoir des idées, à penser à certaines choses. Si tu es tout le temps occupé, ça n’arrive pas.

FB : C’est des questions auxquelles je n’avais jamais réfléchi. Mais ce que vous dites est vrai. Moi je pense que la création vient des répercussions des choses qui m’arrivent et que je ressens quand je suis seul. Les répercussions d’événements vécus, que je filtre une fois seul.

JW : Un peu comme les rêves. Ils n’existent que si tu fais l’effort de t’en souvenir. Sinon ils disparaissent.

GBHM : On prépare depuis quelques temps des playlists hebdo de nos coups de cœur pour le magasine A Nous Paris et je voulais absolument intégrer un titre de « Seul » dans la 4e. Après moult débats avec mon rédac chef, on a fini par choisir « En soirée », qui nous correspondait à tous les deux et nous nous faisait marrer.

FB : Trop bien.

GBHM : Mais en dehors des cinq titres de l’EP, quel morceau parle le mieux de la solitude selon vous ?

JW : Mon titre préféré sur la solitude c’est « Soledad » de Astor Piazolla qui est un instrumental donc tu peux imaginer ce que tu veux dessus. C’est d’une beauté magistrale, à couper le souffle.

FB : Un saudade. Je ne sais pas. Je suis hyper paniqué face aux questions de références musicales. J’ai un système de blocage cérébral par rapport à ça.

GBHM : Ce soir c’est la release party de « Seul ». Mais pour le live du coup, j’imagine que cette fois tu ne le seras pas Mathieu ?

JW : Flavien va venir vers la fin, bien sûr, c’est la surprise.

FB : Il y aura Bing Crosby aussi, le Rat Pack…

JW : Et Dean Martin. Plus sérieusement, il y a Olivier Marguerit qui a fait toutes les flûtes sur le disque qui va venir en jouer. Et j’avais vraiment envie d’inviter Thomas, du clip « Seul » dont on a parlé tout à l’heure, qui est également musicien [du groupe VKNG donc]. Malheureusement il n’est pas à Paris ce soir. C’est trop con parce que ça aurait été chanmé.

FB : Ouais, c’est un boss. Il est super bon dans cet exercice de monter sur scène au dernier moment et de tout déchirer.

JW : Si ça se trouve, il va arriver tu sais.

FB : Il va arriver en moto comme dans le clip. Mais on aurait carrément dû faire un happening comme ça, avec Thomas arrivant en moto au Badaboum !

CONCOURS 

La bonne nouvelle de cette fin d’année c’est que Judah Warsky revient nous enchanter les oreilles le 15 décembre prochain au Petit Bain.
Cette soirée sera également l’occasion de la release party de l’album de Postcoïtum « Learning to be me » sorti le 27 octobre dernier sur Daath Records.

Composé de Damien Ravnich, batteur formé au Jazz et aux musiques improvisées et de Bertrand Wolff, travaillant sur les rapports entre le son et l’image, passé par les Beaux-Arts et le Conservatoire en musiques électroacoustique, le duo marseillais présentera en live cet ovni. Une expérience aussi bien visuelle que sonore qui promet d’être intense et unique.

Comme d’hab’, toutes les infos sont sur l’event ici et les préventes (à prix doux) par .

Histoire de finir l’année en beauté, on vous file 1×2 invit !

Pour participer, il suffit de :
– vous rendre sur notre page Facebook.
– poster sur notre mur : « Judah Warsky ».      

Le tirage au sort aura lieu le 15 Décembre aux alentours de midi et le gagnant averti directement via facebook!

MAUD